Résumé : La Fondation Thabo Mbeki a tenu, du 3 au 6 septembre 2025 à Johannesburg, une édition du « Dialogue africain sur la paix et la sécurité » centrée sur la crise de l’Est de la RDC. Si la manifestation visait l’inclusivité, elle a immédiatement été frappée par un boycott officiel de Kinshasa, des accusations sur la neutralité du facilitateur, et des empêchements de déplacement visant plusieurs figures de l’opposition.

Les enjeux politiques — posture et perceptions

La tenue à Johannesburg d’un dialogue impliquant acteurs politiques, religieux et représentants de groupes armés a immédiatement posé une question : qui détient la légitimité pour conduire la résolution du conflit ? Pour le gouvernement congolais, les pistes diplomatiques déjà engagées (notamment les canaux de Washington et de Doha) doivent rester prioritaires. Pour la Fondation Mbeki, un espace extra-Étatique offre la flexibilité nécessaire pour réunir des voix parfois exclues des mécanismes officiels.

Enjeux diplomatiques — conflits de calendriers et sensibilité régionale

Le format a mis en lumière l’articulation délicate entre médiations africaines et celles menées par des capitales ou organisations internationales. La présence annoncée de représentants de l’AFC/M23 a amplifié la dimension régionale et ravivé les tensions bilatérales, en particulier entre Kinshasa et Pretoria.

Enjeux juridiques — souveraineté, droits et restrictions

Les arguments juridiques mobilisés par Kinshasa reposent sur la préservation de la souveraineté nationale et le caractère potentiellement ‘inopportun’ d’un dialogue tenu hors du territoire sans mandat officiel. À cela se sont ajoutées des problématiques de liberté de circulation : refus de visas, rétention de passeports et autres mesures administratives qui ont empêché plusieurs acteurs d’assister au forum.

Réactions — le tableau complet

Ci-dessous, les positions principales rassemblées — gouvernement, organisateurs, opposants empêchés, autres intervenants et réseaux sociaux.

Gouvernement de la RDC

Kinshasa a jugé l’initiative inopportune et a fermement indiqué sa préférence pour les mécanismes diplomatiques en cours (Doha, Washington). Le porte-parole officiel a mis en doute la neutralité de l’initiative et annoncé un refus de participation au nom de la République.

Afrique du Sud & Fondation

La Fondation Thabo Mbeki a défendu le format en soulignant son ambition d’offrir une plate-forme africaine indépendante pour la construction de solutions. Le gouvernement sud-africain, par des canaux officiels et institutionnels, a présenté l’événement comme une contribution à la stabilité régionale et à la facilitation de dialogues inclusifs.

Autres intervenants

Plusieurs représentants religieux, observateurs et délégations étrangères ont pris part aux débats. Parmi les groupes armés, certains ont annoncé leur présence, cherchant à légitimer une sortie politique à leurs revendications — position vivement contestée par Kinshasa.

Réactions des opposants empêchés de quitter la RDC

Plusieurs figures de l’opposition congolaise ont fait état d’obstacles administratifs et de mesures empêchant leur déplacement vers Johannesburg. Leurs réactions, vives et critiques, ont alimenté le débat sur l’accès effectif à la parole politique dans un forum présenté comme « inclusif ». Voici un résumé des témoignages et déclarations publiquement disponibles :

Jean-Marc Kabund a déclaré que sa tentative de se rendre au Dialogue a été contrecarrée par un refus de visa, qu’il attribue à des pressions du gouvernement. Kabund a dénoncé une atteinte au droit de participer à un débat politique international et a présenté cela comme un exemple de musellement politique.

Jean-Claude Kibala a affirmé que son passeport diplomatique avait été retiré/confisqué, l’empêchant matériellement de voyager. Il considère cette mesure comme une entrave injustifiée à sa liberté d’action politique à l’international.

LGD / Matata Ponyo et d’autres délégués rapportent des difficultés d’obtention de visas et de documents de voyage; certains membres affirment avoir vu leurs candidatures au déplacement bloquées pour des raisons administratives, ce qui les a forcés à se désister.

Ces réactions ont alimenté deux narratifs opposés : d’un côté l’argument du gouvernement sur la nécessité de garder la souveraineté et la cohérence des démarches diplomatiques ; de l’autre l’accusation selon laquelle des mesures administratives auraient servi à empêcher la participation d’opposants qui auraient pu apporter des voix critiques au débat.

Conséquences pratiques : ces empêchements ont affaibli la capacité du Dialogue à se présenter comme entièrement inclusif et ont généré une vague de commentaires (journalistes, ONG et internautes) dénonçant les atteintes à la liberté de circulation et d’expression.

Perception publique & réseaux sociaux

Sur les réseaux, les opinions se sont rapidement polarisées. Des observateurs saluent un effort continental pour traiter une crise complexe ; d’autres dénoncent une supposée partialité et voient dans les empêchements à la participation une manœuvre politicienne. Les fils de discussion en français, anglais et lingala ont amplifié des témoignages, vidéos et threads qui ont contribué à façonner l’opinion internationale.